Danses des bissu de Sulawesi

Marie-Noëlle Robert

Spectacle

Lundi 6 et mardi 7 mars 2006 - Paris

Danses des bissu de Sulawesi Indonésie - Dirigées par Puang Matoa Saïdi
  • Lun 06 mars 2006 à 20:30 - Paris - Maison des Cultures du Monde
  • Mar 07 mars 2006 à 20:30 - Paris - Maison des Cultures du Monde

Sur l’île de Sulawesi plus connue sous le nom de Célèbes, une des plus grandes îles de l’archipel indonésien, vivent les Bugis, dont le nombre s’élève à environ 4 millions de personnes. Établis dans le sud-ouest de la péninsule, les Bugis sont essentiellement centrés autour de Boné, l’ancienne capitale de leur royaume. Excellents marins qui se sont illustrés comme explorateurs, marchands et même pirates, les Bugis ont laissé des traces de leur culture dans le nord de l’Australie et ils ont capturé l’imagination d’écrivains, comme Joseph Conrad, qui ont décrit leurs exploits avec une admiration non dénuée de crainte.

Appartenant au groupe Malais, les Bugis parlent pourtant une langue distincte, le Basa Ugi. Leur texte fondateur, I la Galigo, regroupe toute leur mythologie et leurs croyances. Cette épopée des origines a été mise en scène par Bob Wilson en 2003.

Un des aspects les plus intéressants de la culture Bugis réside dans leur conception des genres : en effet, pour les Bugis, le monde n’est pas simplement partagé entre des hommes et des femmes, mais il existe aussi les hommes en apparence qui sont en réalité des femmes, les Calabai, et les femmes en apparence, mais qui sont en réalité des hommes, les Calalai. Cependant le point le plus saisissant concerne le 5e genre ou métagenre : il s’agit des bissu, ni hommes ni femmes, mais hommes et femmes à la fois car ils sont les représentants des divinités sur terre, et les divinités n’ont pas de sexe défini. Les bissu constituent ainsi une caste particulière, celle des prêtres Bugis. Autrefois nombreux, ils se font de plus en plus rares aujourd’hui. L’importance du rôle que les bissu jouaient dans la société et leur puissance ont décliné en même temps que le déclin du pouvoir du Rajah de Boné. À cela il faut rajouter l’intolérance, et parfois même les exactions, dont ils ont été les victimes en raison de leur travestissement.

Cependant, les bissu ne sont pas de véritables « travestis » comme on peut l’entendre en Occident aujourd’hui. Ni hommes, ni femmes, mais les deux à la fois, les bissu ont des caractéristiques ou des particularismes qui rappellent ces deux genres : par exemple, un bissu se maquillera, mais ne s’habillera pas en femme car il a un costume particulier. Il portera à la ceinture un tatarapa, poignard traditionnellement réservé aux hommes. Malgré tout, la société Bugis a conservé une certaine crainte des bissu à qui elle fait régulièrement appel pour les bénédictions. En effet, les Bugis ont développé un certain syncrétisme entre les croyances pré-islamiques et l’Islam. Les fermiers et les agriculteurs demandent aux bissu de célébrer des rituels liés à la fertilité et aux divinités agraires. De même, ce sont les bissu qui mènent les cérémonies de célébration de tous les insignes royaux à Bone où réside le dernier roi des Bugis. Que ce soit au cours des rituels de fertilité ou des célébrations des insignes royaux, les bissu exécutent des danses qui font référence aux mythes et aux conceptions cosmiques des Bugis. Ces danses, aux mouvements circulaires, sont toujours accompagnées par quatre instruments de musique, un gong, deux tambours gandrang et une flûte pui’pui’.

La cérémonie de bénédiction, comme les rituels dansés exigent que le bissu soit possédé par un dieu. Cette possession se manifeste par une transe et doit être vérifiée. Pour cela le prêtre exécute le ma’giri : il essaye de se transpercer avec son poignard la gorge ou la paume de la main. Si le poignard ne pénètre pas, c’est la preuve qu’il est un bissu « impénétrable» et donc sincère. À son retour dans le monde des hommes, il peut donner sa bénédiction et prédire l’avenir. 

A. E.

 

Lecture

Le Langage des dieux : culte et pouvoirs pré-islamiques en pays bugis, Célèbes-Sud, Indonésie
Gilbert Hamonic, CNRS, 1987.
 

Informations pratiques

Dans le cadre du 10e Festival de l'Imaginaire

Distribution

Avec les bissu
Puang Matoa Saidi
Achmad
Sitti Hawang
Mase
Nani
Muharrang Hasna

Et les musiciens
Basri Baharuddin Sila
Andi Muhammad Redo B.
Abdul Bashit
Syamsuddin Bin Sattu